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Photo du rédacteurMina Peltier

Réouverture des cinémas : immersion dans une expérience oubliée

Près de 9 mois. 300 jours dans les Hauts-de-France. Voilà la durée subie par les salles de cinémas, en attente de desceller leurs portes. Le 19 mai dernier, l'ouverture tant espérée s'est amorcée. Les distributeurs, les producteurs, les exploitants, les critiques, les cinéphiles : tous l'ont attendu avec impatience. La rédaction de M!NEWS vous emmène dans les salles obscures pour (re)vivre ensemble l'expérience - presque - oubliée.


Dans le monde d'après, les cinémas sont clairsemés et calmes, revêtant l'allure d'une messe dominicale en plein centre-ville. Pour le premier, ce clairsemage est imposé : 35 % de leurs capacités, telle est la limite à ne pas dépasser pour les exploitants. C'est si peu qu'aujourd'hui, le réflexe de la réservation en ligne est de mise pour glaner les rares places en vente. Mais démarre rapidement le premier questionnement : que choisir pour ce grand retour au cinéma.

Le choix est vaste. À la réouverture, 400 films étaient en attente. Un embouteillage imposant mais logique, après 300 jours de fermeture totale. Malgré une réunion de crise le 5 mai dernier, les sociétés de productions et de distributions ne se sont pas mises d'accord, poussant la guerre de la concurrence entre films à son paroxysme. Au lieu de 2 semaines, les films sortiront chaque semaine. Ceux ne trouvant pas leur public seront alors évincés.


"Bonne séance !"


Sur place, le traditionnel déchirage de ticket, donnant accès aux salles, s'est vu remplacé par un simple hochement de tête d'approbation. Tout contact entre étrangers, dans ce monde pandémique qu'est le nôtre, est dorénavant prohibé donc supprimé. Malheur à celles et ceux qui cherchaient – vainement – l'utilité de ce geste. La hantise du "Merci, à vous aussi" en réponse aux mécaniques "Bonne séance !" reste, elle, bien vivace.


Dans les salles, où la seule vue de têtes étrangères éparses procurent une bouffée nostalgique, c'est dorénavant l'abondance du choix qui fige au seuil : où se placer ? Dans le fond discret ? Au premier rang immersif ? Dans le juste milieu ?

Terminées ces séances horrifiques passées aux côtés d'inconnus, systématiquement adeptes de bruits corporels. Terminées ces séances où votre voisin de derrière s'est appliqué à tambouriner – crescendo – votre dossier. Dorénavant, dans ces jauges à 35 %, les spectateurs sont isolés, séparés des autres par deux sièges à chaque point cardinaux. Bonjour tranquillité !


Sonne alors l'entrée en scènes des annonces, aux premières illuminations de l'écran. Ces publicités, oubliées par la plupart des confinés depuis mars 2020, ont une saveur étrange. Rapidement, il apparaît clair que la majorité d'entre elles ont enfin été renouvelées. Adieu, ces pubs locales apprises par cœur, car diffusées en boucle depuis 2005.

Cette attente des derniers instants autrefois pénibles devient désormais l'occasion pour les distributeurs et les producteurs (comme UGC, Canal+ ou OCS) de transmettre leur ravissement. Comprenez ! Le manque d'audience, certes, mais surtout de manne financière les poussent à remercier le public, à coup de messages d'amour sur fond de piano ému par ces retrouvailles.



Ça commence !


Enfin, le film. Ces 3 secondes où l'écran noir s'élargit jusqu'aux bords, déployant ainsi toute sa longueur, sont restés savoureux et particulièrement intimes : ça commence ! Alors que les lumières s'éteignent, il reste un dernier instant aux spectateurs pour jeter un coup d’œil à ces crânes luisants, ces nez nonchalamment déployés hors des masques, ces derniers chuchotements, ces premiers regards concentrés.


Puis le silence. Le silence d'une salle à l'unisson dévouée au visionnage d'une œuvre. Adieu crunch et slurp rapidement omniprésents, à ces mains avides farfouillant des seaux remplis et à ces raclages de fonds de gobelets. Boissons, pop-corn et snacks sont en effet interdits jusqu'au 9 juin prochain.



Alors que le générique-sans-fin déroule rapidement les centaines de noms à l'origine de nos films, les spots aveuglants et sans mercis se rallument. Les visages, engourdis par cette lumière oubliée, le sont aussi par les larmes, les rires, les déceptions vécus durant cet interlude filmique. Il est délicieux de retrouver, le temps de quitter la salle, ces quelques commentaires de compagnons de visionnage, avides de revenir sur un film à peine volatilisé.

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