La romancière Anne Rice s’est éteinte le 11 décembre 2021 à l’âge de 80 ans. Autrice américaine de romans fantastiques, elle a vendu plus de 100 millions de livres à travers le monde. Célèbre pour la saga littéraire Chroniques des vampires, Anne Rice s’est fait connaître à 35 ans avec son premier tome, Entretien avec un vampire.
Entre réalité et fiction
Anne Rice est née en 1941, à la Nouvelle-Orléans, en Louisiane. Cette terre américaine, porteuse de mythes et de croyances, est propice aux rêveries et aux mystères. Sa soeur, Alice Borchardt, est aussi une auteure célèbre. Attirées par la science fiction, elles dévorent les romans de Richard Matheson et Ray Bradbury.
En 1972, Anne Rice perd sa fille, Michèle, qui meurt des suites d’une leucémie. Endeuillée, l’écrivaine écrit Entretien avec un vampire et se réfugie dans son univers fantastique. Anne Rice ne souhaite pas faire le récit de sa vie dans ses romans. Pourtant, elle créée le personnage de Claudia, une jeune vampire du même âge que Michèle. Si elle reconnaît que le lien est possible, Anne Rice indique que cela était involontaire.
La romancière est attirée par les personnages marginaux, les vampires mais aussi les sorcières (cf. La Saga des sorcières Mayfair). Anne Rice apprécie le prisme de ces outsiders sur le monde actuel.
Le mythe du vampire
Au Moyen-Âge, le vampire fait partie des croyances relatives à la mort face aux pandémies. La littérature s’empare du mythe dès le XVIIIème siècle, avec La fiancée de Corinthe. Ce poème, écrit par Goethe, raconte l’histoire d’une jeune femme décédée qui rend visite à l’homme qu’elle a aimé. Bram Stoker publie Dracula un siècle plus tard, un chef d’oeuvre gothique qui fait du vampire une figure iconique.
Au XXème siècle, le cinéma joue un rôle dans le sacre de la créature immortelle et contribue à le moderniser. Murnau met en scène un Nosferatu d’une laideur repoussante qui mord ses proies dans leur sommeil, guidé par son instinct. En 1931, Béla Lugosi incarne le comte de Dracula à la manière d’un dandy bien plus séduisant, ensuite repris par Christopher Lee.
L’inspiration d’Anne Rice provient du cinéma bien plus que des livres. Très jeune, elle assiste à une projection de la Fille de Dracula, qui explore les tourments d’une jeune peintre vampire luttant contre sa nature et cherchant sa rédemption.
C’est la voie qu’elle prend pour ses personnages dans Chroniques des vampires, qui sont confrontés à un conflit intérieur. C’est le cas de Louis, qui ne supporte pas de devoir prendre des vies humaines pour se nourrir.
Les personnages d’Anne Rice sont compatissants et sensuels. Elle contribue à donner au mythe du vampire une seconde jeunesse en s’éloignant de tout manichéisme.
L’héritage d’Anne Rice
L’écrivaine a favorisé l’émergence du vampire séduisant voire érotique. Boire du sang devient un plaisir, semblable à un orgasme. La créature immortelle n’est plus aussi diabolique et peut livrer une voix intime. Lestat, qui n’était pas à l’origine le principal protagoniste, est devenu le héros séducteur de la saga littéraire. Incarné par Tom Cruise à l’écran, l’adaptation d’Entretien avec un vampire au cinéma couronne l’oeuvre d’Anne Rice, où figurent aussi Brad Pitt et Kirsten Dunst. Le film est nommé aux Oscars pour la meilleure direction artistique (Dante Ferretti et Francesca Lo Schiavo) et la meilleure musique (Elliot Goldenthal).
À partir des années 1990, les sagas littéraires qui mettent en scène des vampires se multiplient. Charlaine Harris publie le premier tome de la série La Communauté du Sud, qui compte 13 romans. Elle est adaptée en série télévisée sous le nom de True Blood.
Stephenie Meyer publie Fascination en 2005, premier tome de la saga Twilight, qui connaît un franc succès. L’adaptation cinématographique avec Robert Pattinson dans le rôle d’Edward Cullen devient populaire et met en scène un vampire chaste qui ne se nourrit que de sang animal.
La créature devient la victime d’une malédiction et est dotée d’une âme presque puritaine, bien loin de l'imaginaire diabolique qui entourait le vampire.
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