Converser est une action aussi vielle que le langage existe. Forme essentielle pour la communication, la conversation se définit comme une activée plutôt structurée, même si parfois son débordement est inévitable. Qui n’a jamais eu de dialogue houleux sur un sujet, à tout hasard féministe ? Savez-vous que la conversation en elle-même souffre du patriarcat et subit les codes de la domination masculine ?
En premier, la longueur des interventions différent selon le genre. Naïvement, j’osais penser que chaque personne lors d’une conversation disposait du même temps de parole. Pourtant, la réalité était encore loin de mon utopique imagination. Il est répandu que la femme est bavarde. Dale Spender, écrivaine australienne et féministe, a cherché une raison à ce stéréotype pour expliquer son fonctionnement. Elle met en lumière le sexisme total de ce préjugé puisqu’en réalité, la femme est vue "bavarde" non pas en comparaison du temps de parole de l’homme, mais en comparaison des femmes silencieuses. C’est-à-dire que la norme est le silence.
La femme ne domine pas la conversation car le patriarcat réduit la femme au silence. Cette dernière n’a donc rien à ajouter à une conversation, qui peut être le synonyme d’influence. Il est donc logique, dans ce cheminement de domination, que la femme prenne moins la parole que l’homme.
Ensuite, les "permissions accordées" durant les conversations semblent varier selon le genre. L’interruption de la parole des femmes est sans doute une illustration du système inégalitaire en place. Peu importe le statut social, la profession, l’âge de la locutrice, si un homme est en face d’elle, il a plus de "chances" de lui couper la parole.
Après avoir eu la parole coupée, les femmes ont tendance à rester silencieuse, ce qui amène une seconde domination : imposer le silence aux femmes. Connaissez-vous une femme qui se plaint après s’être fait couper la parole ? Et un homme ?
West & Zimmerman, deux sociologues américains, font d’ailleurs l’analogie entre ces dialogues femme/homme et les conversations enfant/adulte où l’enfant n’a qu’un droit limité à la parole. Comme pour les enfants, le tour de parole des femmes apparaît non-essentiel. L’enfant reçoit lui aussi une influence de notre système sexiste. Dès la plus petite école, les enfants intègrent des normes sociales. Celles-ci reproduisent encore une fois le fonctionnement du schéma patriarcal : les garçons à l’école seront moins réprimés que les filles sur certains sujets.
Il est connu que les garçons sont turbulents et les filles sont calmes. En réalité, les garçons sont juste autorisés à l’être. Ces enseignements conduisent à une domination masculine de toute la société. Cette domination est si ancrée dans l’esprit collectif qu’elle en est difficilement remarquable. Les hommes qui se disent "alliés" de la cause féministe reproduisent eux aussi ces actions.
Bien évidement, il serait absurde d’affirmer que la domination est consciente. La majorité des hommes ne se rendent pas compte des schémas patriarcaux qu’ils utilisent. L’idée ici, est d’expliquer, d’éduquer d’une autre façon, d’un autre point de vue, pour que tout le monde comprenne que la domination masculine se passe surtout dans les actions du quotidien.
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